Corps et politique: envisager la justice pénale d’Ancien Régime comme lieu de production d’une nouvelle épistémologie de l’individu

Au cours du XVIIIe siècle, la justice d’Ancien Régime passe d’une logique expiatoire enracinée dans sa dimension exemplaire, à une approche axée sur la réforme du comportement des criminels et de leur âme. Cette nouvelle perspective repose sur une lecture ontologique de l’individu radicalement différente: si le corps est l’unique objet sur et par lequel la justice se fait, se dit, se montre, cette double finalité expiatoire et exemplaire cède le pas à la volonté de se saisir du problème de la violence et de sa répétition afin d’endiguer l’anomie sociale. Comprendre la dynamique du crime et de sa récidive implique donc de reformuler la question élémentaire de l’origine du mal oscillant entre nature et culture.

Cette nouvelle orientation s’inscrit dans une perspective de rationalisation des savoirs portant sur l’individu: pour pouvoir agir sur la conscience, il devient nécessaire de mieux comprendre son fonctionnement. Ainsi, notre hypothèse de travail consiste à identifier la sphère pénale comme un espace propice à l’élaboration d’un savoir et d’une épistémologie de l’individu. Nous aimerions, dans le cadre de cette présentation, éprouver cette proposition en observant comment se constitue une sémiologie du corps et de la violence - létale ou non; et comment, en établissant dans le dispositif de la justice pénale un lieu d’observation privilégié du corps, s’opère progressivement une construction épistémologique de l’individu.

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